Lettre du 18 avril 2010
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Chers parents et amis,
« La foule rassemblée devant le commissariat demandait qu’on lui livre les coupables. Elle voulait les lyncher.La police a tenu bon. Mais un jour tout cela peut effectivement déraper … ». C’est l’information que vient de me livrer Laurent CHAPIN, un français d’une soixantaine d’années né et domicilié à Antsirabe.
En fait, selon les explications que j’ai pu recueillir, cinq gendarmes en uniforme auraient immobilisé avant-hier en plein jour dans la forêt de tapia au sud d’Ambohimanjaka, entre Antsirabe et Ambositra, un taxi brousse dans l’intention d’en détrousser les occupants, une quinzaine de personnes en provenance de Tuléar. Mais le chauffeur aurait échappé à la vigilance de ses agresseurs et pu prévenir la gendarmerie de Mandoto. Les malfaiteurs, le taxi brousse volé, les voyageurs pris en otage auraient alors été arrêtés à leur passage dans cette petite ville pour être immédiatement conduits au poste de police d’Antsirabe. D’où l’attroupement et la colère d’une population indignée et à bout de patience.
Madagascar s’enfonce dans une crise apparemment sans issue.
Voici en cette circonstance fâcheuse mais non exceptionnelle la position officielle actuelle de l’ambassadeur de France.
« La France souhaite pour Madagascar un retour le plus rapide possible à l’ordre constitutionnel démocratique dans l’esprit de réconciliation de Maputo. L’organisation d’élections dès que les conditions minimum requises seront remplies nous semble la meilleure solution. La crise n’a que trop duré. Le peuple n’a que trop souffert. Quelles sont ces conditions minimum ? J’en vois trois : la mise en place d’un Gouvernement consensuel et inclusif chargé de gérer les affaires courantes ; l’établissement d’une Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) elle-aussi consensuelle et agréée par l’ensemble des parties concernées ; la mise en place de l’accord d’amnistie tel que prévu par les accords de Maputo et d’Addis Abeba . Si ces trois conditions sont bien remplies, je suis convaincu que la reconnaissance et l’appui de la communauté internationale seront au rendez-vous.
Mais ces élections ne sont pas une fin en soi. Au contraire, elles doivent être une étape du renouveau et ouvrir une nouvelle période. Car c’est à partir de cette étape que la nécessaire réconciliation nationale devra être engagée. Cette réconciliation sera une occasion unique de mettre un terme à la spirale infernale des crises malgaches. Les leçons devront être tirées par tous et pour tous .. ».
Les amifama – les amis des fatima de Madagascar- qui n’ont pas encore un an d’existence s’efforcent cependant de mettre en œuvre avec patience l’important programme évoqué dans leur appel au don de la fin de l’année 2009.
Le projet de construction de l’ensemble scolaire pour les 1200 enfants d’Ambinanindrano est reporté sine die. Nous avions établi un programme d’intervention sur cinq ans qui allait de l’établissement du plan masse par l’Ecole d’Architecture de Bordeaux à la construction du collège d’enseignement général en passant par la constitution d’un comité de soutien, la construction du pensionnat, des logements des enseignants, l’usine de fabrication d’agglomérés, la carrière d’extraction des moellons… Devant l’importance d’un tel programme la Supérieure générale n’a finalement pas souhaité engager la congrégation au delà de la durée de son mandat, soit juillet 2012. Nous nous contenterons donc de soutenir la construction de quelques salles de classe pour pallier l’insuffisance actuelle de moyens d’enseignement à Ambinanindrano.
En ce qui concerne la maison Jacinta destinée au logement des sœurs enseignantes, la participation des amifama est finalement limitée à la préparation des dossiers. Des demandes de financement ont été adressées par la congrégation via la nonciature à des organismes d’église en Angleterre et en Espagne.
Il reste que les projets en cours ne sont pas insignifiants : parrainage collectif du collège Jacinta à Antsirabe (2500 euros), contribution aux besoins vitaux des sœurs (1000 euros), renforcement de l’adduction d’eau (7000 euros) et mise au point du système de télécommunications à Ambinanindrano (300 euros), soutien à une activité génératrice de revenus à Ambolotara (400 euros), formation à la gestion d’une formatrice de formateurs (1500 euros), aménagement du terrain et du bâtiment confiés par la congrégation à la gestion des amifama (4000 euros déjà engagés).
Cet aménagement n’est pas encore définitivement chiffré. Selon les vœux de la congrégation soucieuse de son avenir et avec l’aide de Sœur Clotilde affectée à l’accompaghnement au quotidien des amifama, les amifama investissent dès maintenant sur le terrain qui leur a été confié dans la recherche d’activités génératrices de revenus telles que, tourisme en mission, jardin tropical amélioré.
Dés la fin du mois de mai deux chambres – une double et une simple – et une cuisine équipée permettront l’accueil à Vohipahasoavana – 10 km au nord d’Antsirabe - des touristes en mission.
Des contacts sont déjà engagés en France avec JTs – Jardin Tropical Semences – et projetés à Madagascar avec FERT – formation paysanne et promotion des organisations professionnelles agricoles - pour créer sur le terrain des amifama un jardin tropical amélioré destiné à la formation des sœurs en vue de leur autosuffisance alimentaire.
En plus de tout cela il faut s’organiser pour administrer convenablement les amifama. En France heureusement il y a Bernard. J’avoue qu’ici, en son absence, je suis quelque peu débordé.
L’automne est désormais bien installé. Les nuits sont fraiches mais les journées sont joliment ensoleillées.
Les dates de mon prochain séjour en France sont fixées. Arrivée à Orly le dimanche 6 juin et retour le 11 septembre.
A tous mon amical souvenir et/ou mes affectueuses pensées.
René-Georges BILLIOTTE alias Dadabe Gégeo